« La situation immobilière #corse justifie un dispositif dérogatoire »

INTERVIEW. Le Conseil constitutionnel a rejeté le 29 décembre 2013 la prolongation du dispositif d’exonération des successions pour les biens immobiliers situés en Corse. Alain Spadoni, président du Conseil régional des notaires de Corse, nous donne son point de vue sur cette décision.

Toutsurmesfinances.com : Que pensez-vous des motifs invoqués par le Conseil constitutionnel pour rejeter le prolongement du dispositif d’exonération des droits de succession en Corse ?

Alain Spadoni : La première chose qui me frappe c’est que le Conseil constitutionnel a été saisi sur l’ensemble du Projet de loi de Finances 2014 par l’opposition et que sur les 24 articles qu’il a retoqués, un seul l’a été sans motif : celui sur la Corse. Le Conseil s’est contenté de dire que le dispositif était contraire au principe d’égalité des territoires. Seulement, le rapport établi par 14 experts nommés par le gouvernement en début d’année 2013 a bien précisé que la situation juridique exorbitante des biens immobiliers corses justifiait un dispositif dérogatoire.

En quoi la situation corse nécessite un dispositif particulier ?

Le problème vient d’un désordre juridique exorbitant du droit commun : il y a très peu de titres de propriété en Corse. Pourtant, on ne peut rien faire sur un bien immobilier si on ne possède pas de titre de propriété : on ne peut pas le vendre, on ne peut pas le donner, l’hypothéquer, le partager, … Cette situation entraine par conséquent la multiplication des maisons et immeubles laissés à l’abandon, il y a un vrai problème de désertification et de délabrement du patrimoine. Prenons des statistiques du ministère de l’Economie et des Finances pour illustrer ce phénomène : à Ajaccio, de 1956 à 2006, 42% des biens immobiliers de la ville n’ont fait l’objet d’aucune mutation. Dans le village de Sisco, 70% des biens portés au cadastre appartiennent à des gens morts avant 1900.