(Lutte Internationale, Unità Naziunale, Corsicainfurmazione.org, publié le 16 juillet 2025) Le 12 juillet 2025, un accord dit « de Bougival » a été signé entre l’État français et les principales formations politiques de la Nouvelle-Calédonie.
Ce texte, présenté comme une avancée historique, semble redéfinir les fondements institutionnels de ce territoire. Mais à bien y regarder, cet accord est tout sauf une certitude. Il est une promesse conditionnelle, suspendue au bon vouloir d’une Puissance administrante en proie à une instabilité politique sans précédent.
Comment peut-on raisonnablement envisager de modifier la Constitution française dans un contexte politique où l’Assemblée nationale est divisée, où il n’existe aucune majorité stable ?
Comment peut-on bâtir l’avenir d’un Pays sur des hypothèses institutionnelles aussi fragiles?
La révision constitutionnelle que suppose « l’accord Bougival » est loin d’être acquise. Elle requiert une majorité des 3/5e du Congrès, un alignement politique des deux chambres, et un calendrier législatif lisible.
Au regard des principes de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, la reconnaissance et l’exercice du droit à l’autodétermination d’un peuple :
1°- ne peut pas dépendre d’un calendrier électoral fixé exclusivement par la puissance administrante ;
2°- ne peut pas être suspendu aux équilibres précaires d’un Parlement en grande instabilité ;
3° doit être garanti par un cadre neutre, équitable et international, celui des Nations Unies.
Ce combat pour l’autodétermination des peuples ne concerne pas uniquement la Kanaky. Il est un signal fort pour tous les peuples des territoires non-autonomes du Pacifique. Il pose une question de fond pour Ma’ohi Nui aussi :
Avons-nous le droit de décider librement de notre destin, ou devons-nous continuer à dépendre du bon vouloir d’une Puissance administrante instable, lointaine et souvent indifférente?
Nous saluons l’engagement au dialogue institutionnel entre les parties, expression d’une volonté commune de surmonter les clivages politiques. Ce choix du dialogue mérite d’être reconnu, car il est le socle de tout processus démocratique.
Toutefois, nous appelons à la vigilance face à la fragilité et l’ambiguïté de fond d’un tel accord, fondé sur une réforme constitutionnelle incertaine, dans un contexte institutionnel instable « au sein de la République française ». Car, comme pour le peuple de Ma’ohi Nui, tant que le peuple kanak ne sera pas pleinement associé à un processus d’autodétermination encadré et reconnu par la communauté internationale, la décolonisation ne pourra être tenue pour achever au regard du droit onusien, ni honorée au regard de l’Histoire.
Nous réaffirmons que la reconnaissance d’un peuple et l’exercice, par ce dernier, de son droit à l’autodétermination, ne peut s’accommoder de compromis juridiques ou de constructions institutionnelles ambigus. Elle appelle un acte de vérité, un engagement clair, et une démarche conforme aux principes fondamentaux des Nations Unies et des déclarations onusiennes en matière de décolonisation.
Ma’ohi Nui, elle-même inscrite sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser, sait ce que signifie cette attente, cette exigence de justice. C’est pourquoi nous réaffirmons ici notre soutien fraternel au peuple kanak dans sa marche vers la pleine souveraineté, et appelons à ce que toute solution respecte à la fois la mémoire, la volonté, et le droit inaliénable des peuples à disposer d’eux-mêmes.
L’effort subtil de la Puissance administrante de provoquer l’instauration d’une prétendue «Quatrième Option» de décolonisation, à la marge de celles internationalement posées par la Déclaration 1541 (XV) du 15/12/1960 de l’Assemblée Générale des Nations Unies, ne dupe pas le parti Tavini Huiraatira, qui s’oppose clairement à une telle orientation pour Ma’ohi Nui qui est réinscrite sur la liste onusienne des territoires non-autonomes depuis le 17 mai 2013.
Le Tavini Huiraatira réaffirme donc le processus d’accession de Ma’ohi Nui à la souveraineté pleine et entière, sous les seuls auspices des Nations Unies, et réitère son appel à l’instauration du dialogue de décolonisation entre les institutions Polynésiennes et la France.
Oscar Manutahi Temaru
Président du Tavini Huiraatira