[Euskal Herria] ETA : Gabi Mouesca se dit dégoûté et inquiet

L’ancien militant d’Iparretarrak dénonce les réactions des partis politiques traditionnels. Aujourd’hui âgé de 50ans, Gabi Mouesca fut l’un des leaders historiques d’Iparretarrak, organisation terroriste basque française, auteur de nombreux attentats entre les années 1970 et 1990. Il a été arrêté en 1984 pour un hold-up et la fusillade du camping de Léon dans les Landes, au cours de laquelle un gendarme a été tué et un militant a disparu. Jugé 16 ans plus tard, Il a purgé 17 ans de prison. Libéré en 2001, Gabi Mouesca a notamment été président de l’Observatoire international des prisons.

« Sud Ouest ». Comment réagissez-vous à l’annonce faite par ETA de la fin définitive de son action armée ?

Gabi Mouesca. Contrairement à beaucoup de gens qui se sont exprimés, je ne vis pas ce moment dans la joie ni avec un optimisme démesuré. Nombre de réactions lues ou entendues m’ont fortement dégoûté. Pourquoi ne suis-je pas euphorique ? Parce que les raisons qui ont conduit à ce que ce pays soit la terre d’un conflit dur n’ont pas disparu. Et pour l’heure, on est loin du compte.

Quelles sont ces raisons ?

La non-application des textes internationaux, le droit à l’autodétermination par exemple. Le fond de la question n’est pas l’usage ou non de la violence, mais l’application ou non des textes internationaux. Et notamment le recours à l’autodétermination.

Qu’est-ce qui vous a dégoûté ?

Des prises de paroles de gens de l’ensemble de l’échiquier politique traditionnel qui se sont exprimés sous couvert de responsabilités politiques et qui jusqu’à présent ont surtout brillé par leur irresponsabilité politique sur la question basque. Ce sont des résistants de la 25e heure, des gens qui, depuis des années, auraient dû avoir pour devoir de s’impliquer.

Le maintien de la violence, ils en sont grandement responsables.

Que dites-vous à ceux qui pensent que face à ETA, c’est l’usage familier de la démocratie qui a finalement gagné ?

Qu’il faudrait justement que cette familiarisation de la démocratie soit appliquée. Je reviens sur cette question de l’autodétermination. La parole doit être donnée au peuple. Aurait tort celui qui analyserait la situation comme une mise à genou d’ETA. Si la paix doit couvrir de son manteau le Pays basque, ce n’est pas en désignant un gagnant et un perdant. Si gagnant il doit y avoir, c’est uniquement la justice.

Quelles doivent être, à votre avis, les prochaines étapes du processus ?

Pour ce qui est du Pays basque Sud, je n’ai pas d’avis à émettre. Nous sommes face à une conscience politique tellement affûtée que je ne doute pas de la pertinence des choix présents et à venir qui seront faits par la gauche abertzale.

En revanche, je suis très inquiet pour le Pays basque Nord. Après les belles paroles liées à la conférence de Donosti, il est temps pour les partis politiques traditionnels de prendre leurs responsabilités et d’interpeller Paris. Et surtout, de ne pas se méprendre. La question au Pays basque Nord n’est pas minorée. Nous ne sommes pas un confetti. Il y a des réalités qu’il faut prendre au sérieux. La question de la langue, par exemple.

Grâce aux luttes et aux rapports de force, un système éducatif a été mis en place qui permet de former des gens. Mais si, une fois formés, ils arrivent dans une société où le basque est considéré comme une sous-langue, cela pourrait former un terreau d’injustice pour des révoltes futures.

Nous n’attendons pas une issue heureuse au Pays basque Sud pour obtenir quelque chose ici. C’est maintenant que le gouvernement français doit prendre en compte ce qui se passe ici. La mise en place d’une institution autonomique permettrait un lien institutionnel avec ce que sera le Pays basque Sud, demain et après-demain. Et évitons de faire référence à des outils politiques désuets.

Quelle place attribuez-vous à la question des prisonniers ?

Elle est fondamentale. Nous avons vécu trente ans de trop de prison. Trente ans de trop de sang et de larmes.

Même si nous avons, en toute légitimité, utilisé les armes – l’utilisation des armes est le résultat d’un échec partagé – depuis le 20 octobre, chaque jour de prison est un jour de trop.

Tous les grands ténors qui se sont exprimés doivent s’engager pour la libération des prisonniers et une demande immédiate d’amnistie.

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