(Unità Naziunale Publié le 18 février 2019) Femu a Corsica, suite au débat suscité sur la place de la Langue Corse dans la réforme du lycée et après l’amendement soutenu publiquement par le ministre Blanquer, puis adopté, qui impose l’affichage obligatoire du drapeau tricolore, et des paroles de l’hymne français dans toutes les salles de classe, s’inquiète et s’oppose fermement à cette recentralisation jacobine et patriotique de l’Ecole avec le projet de loi « Pour une école de la confiance ».
- Concernant la langue Corse
La réforme du lycée va provoquer une mise en concurrence des matières et en particulier des langues. La Langue et culture corse qui a déjà une place marginale au lycée (20% des élèves) va encore s’affaiblir, si le ministère et le rectorat ne corrigent pas cela. Tout d’abord, concernant la spécialité « Langue, littérature, civilisation Corse », nouvellement créée et pesant 16% de la note, le rectorat doit s’assurer de sa présence dans tous les établissements de l’île et pour cela la notion de seuil à 24 élèves pour ouvrir un enseignement de spécialité doit être supprimer.
Ensuite l’option Corse (LVC), pour garder son attractivité, doit être alignée sur le régime particulier des langues anciennes (LCA) avec un coefficient 3 et une possibilité de cumuler avec une autre option. La continuité collège-lycée bilingue doit être aussi consolidée avec le maintien des filières bilingues existantes et leur renforcement par la création d’un BAC « mention Corse », où l’élève pourrait passer une discipline non linguistique (DNL) en langue corse comme dans les sections européennes.
De manière générale, l’Etat se doit de respecter ses engagements du Pianu Lingua 2020 avec un véritable plan de formation des professeurs bilingues du primaire au lycée, ou un soutien aux expérimentations immersives. En dehors de ces solutions à adopter sur le court terme, seul un véritable statut officiel pour la langue Corse lui permettra de sortir de la marginalité : Lingua Corsa ubligatoria.
- Un projet de loi affaiblissant les territoires et en contradiction avec le statut d’île montagne
Ces réformes scolaires vont affaiblir considérablement le tissu scolaire et un maillage équilibré entre tous les territoires. La fracture urbain/rural va s’accentuer avec une rationalisation des ressources sur l’autel de l’austérité rejetant l’équité et une éducation au plus près des territoires.
Sur le primaire, nous demandons un moratoire sur le maintien et la consolidation des écoles du rural et de montagne, chaque année menacée, et qui sont le cœur de vie de nombreux villages.
Le maintien des services publics, objectif du statut d’île-montagne, ne doit pas être remis en cause par cette loi.
Ensuite la réforme du lycée va porter un coup terrible aux petits lycées ruraux et de montagne pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les 12 enseignements de spécialité ne seront pas proposés partout
provoquant une perte d’attractivité ; les 7 enseignements promis sur l’ensemble des lycées par le ministre, sont déjà en danger avec le seuil à 24 élèves. Ce seuil est impossible à tenir dans des lycées à petits effectifs. De manière globale, ce sont les moyens (postes, dotation horaire globale) qui doivent être revus à la hausse pour une Ecole de la réussite et un équilibre entre les territoires ruraux et urbains. Si l’une des marottes du ministre est de favoriser l’expérimentation, des projets innovants locaux, on ne peut le faire avec des moyens qui diminuent année après année.
- Un projet éducatif jacobin en contradiction avec un projet adapté à la Corse
Plusieurs indicateurs nous inquiètent, laissant apparaitre une dérive jacobine de l’Education Nationale.
L’amendement récemment adopté sur l’obligation d’afficher les drapeaux français, européens et la Marseillaise n’est qu’une illustration de la direction populiste que prend le gouvernement.
La liberté du professeur est aussi mise à mal avec « un devoir d’exemplarité » assez ambigu. Un professeur n’affichant pas un drapeau dans sa salle sera-t-il qualifié de professeur déviant ?
L’Etat reprend la main partout, les nouveaux programmes sont aussi le reflet d’une imposition par le haut : trop lourds et inadaptés, parfois teintés d’une idéologie réactionnaire. Enfin un autre mauvais signal est donné avec la formation des professeurs dans les ESPE où le directeur sera désormais nommé par le Ministre de l’Education et de l’Enseignement supérieur et non par l’Université ; à cela s’ajoute un manque de liberté au niveau de la formation proposée qui sera de plus en plus imposée par Paris, et un manque d’adaptation au local. Une école hors-sol niant les réalités locales, à « l’usu Troisième République » mais avec un esprit néo-libéral où la concurrence et la compétitivité sont les maitres- mots, n’est pas un modèle que nous voulons pour la Corse.
- L’Ecole doit s’emparer de problématiques sociétales
De nombreuses problématiques ne sont pas encore pris à bras le corps dans les projets de réforme ministérielle : les violences morales ou physiques, avec le problème du harcèlement scolaire, amplifié par la place des réseaux sociaux ; la délinquance et les trafics de drogue de plus en plus proches des collèges et lycées. L’Ecole doit mener une véritable politique de prévention active, d’actions pour lutter contre ces phénomènes mortifères pour notre société. L’Etat doit quant à lui assurer la sécurité de tous en luttant de manière active contre ces fléaux de la société.
Pour répondre à ces défis, Femu a Corsica demande de manière urgente, à la majorité territoriale, au président de l’Exécutif, aux conseillers exécutifs responsables de l’éducation, en particulier, la mise en place d’Etats généraux de l’Education, sur le modèle de la Conférence sociale, dans une démarche de co-construction avec les représentants du Rectorat et tous les acteurs de l’Education en Corse, afin d’envisager un cadre normatif spécifique pour l’académie et créer un véritable modèle d’éducation adapté à la Corse et éviter la dérive autoritaire, jacobine et technocrate que semble imprimer la loi Blanquer.
Partitu FEMU A CORSICA
18 février 2019